lundi 2 septembre 2013

Syrie : le mandat, seule option restante


Au début, j’étais plutôt contre l’intervention en Syrie. Un peu sur la même base que tout le monde : les interventions en Irak et en Libye  auxquelles j’ai toujours été opposé, se sont révélées être des fiascos. Même en Afghanistan, l’intervention (qui avait ma bénédiction, celle-là, parce que le régime des talibans était quand même clairement pire que celui de Kadhafi ou de Saddam Hussein ; et même si tout le monde s’en fiche, d’avoir ma bénédiction pour partir en guerre, j’aime autant le dire) n’avait pas tenu ses promesses, loin de là.

Bref, en Syrie, je sentais le énième échec, l’intervention pour rien. Je me disais que décidément, tous ces dictateurs étaient cons comme des pieds, qu’ils ne savaient pas y faire et que si j’étais dictateur, ça ne se passerait pas comme ça. Voyez plutôt Mohamed VI, au Maroc : voilà un autocrate intelligent ! Il a un pouvoir plus ou moins absolu ; des manifestants protestent, et que fait-il ? Envoie-t-il la police, l’armée, les tanks, les gaz ? Les met-il dans des geôles sinistres ? Que nenni : il les laisse causer, s’agiter, puis leur donne une petite réformounette qui ne change pas grand-chose mais renvoie chacun dans ses foyers avec le sentiment du triomphe et la participation au Sens de l’Histoire. Futurs autocrates, prenez-en de la graine.

Donc je trouvais Bachar el-Assad très con, en plus d’être passablement cruel, mais je me disais que le peuple syrien n’avait pas grand-chose à gagner à une intervention militaire occidentale visant à faire tomber le régime.

Et puis les choses ont empiré. El-Assad a commencé à capturer, torturer et assassiner des gosses de 10 ans, et là je me suis dit qu’on pourrait quand même songer à y aller. Problème : pour ne pas être en reste, les rebelles se sont dit qu’il fallait qu’ils fassent un peu des conneries eux aussi. Quand ils ont exécuté un jeune homme de moins de 25 ans en pleine rue pour avoir professé son athéisme, j’ai posté sur Facebook : « À ma droite, Bachar El-Peste, alias le Sanguin ; à ma gauche, la nébuleuse al-Choléra, alias les barbus. Ambiance. » Donc, l’intervention militaire continuait à me sembler une option hasardeuse. Démettre un dictateur qui tue les gosses, c’est bien, mais si c’était pour mettre à la place un régime qui tue les athées, merci mais non merci.

Aujourd’hui, je pourrais dire qu’on en est toujours là. Le problème, c’est que Bachar el-Assad s’enfonce dans l’horreur. De toute évidence, il ne peut plus rester en place : il doit être chassé du pouvoir, et nous, Occidentaux, sommes les seuls à pouvoir le faire rapidement. Ne pas agir, à l’heure qu’il est, c’est, appelons les choses par leur nom, de la non-assistance à peuple en danger, c’est de la complicité de massacre de masse. Nous savons, nous pouvons, ne manque que la volonté.

Au passage, j’avoue ne pas comprendre mes concitoyens : quand je vois que l’intervention militaire en Syrie est largement impopulaire, tant en France qu’aux États-Unis ou au Royaume-Uni, alors que l’intervention en Irak, sur des motifs infiniment moins graves, recueillait une large approbation chez les anglo-saxons, et suscitait une vraie fracture en France, je me dis qu’il y a un vrai problème d’empathie et de solidarité. Pareil chez mes coreligionnaires : quand j’entends mes frères chrétiens appeler à la prière pour la paix et pour que les Occidentaux n’interviennent pas, j’ai envie de leur rappeler une évidence : le statu quo, c’est tout sauf la paix. Prier pour la non-intervention, ce n’est pas prier pour la paix, c’est prier pour la poursuite du massacre. Mais passons.

Le hic, c’est que l’autre partie du problème, elle, est toujours là aussi. Actuellement, les rebelles syriens sont-ils à même de gouverner le pays ? Au vu de qu’il se passe et de leur manière d’agir avec les athées, les chrétiens etc., on peut sérieusement en douter. Alors quoi ? Ne pas intervenir n’est plus une option moralement défendable. Il n’en reste donc plus qu’une : le mandat. Il faut chasser Bachar el-Assad par la force, mais la Syrie doit être ensuite gouvernée par l’ONU pendant quelques années.

J’entends déjà les cris d’orfraie, les accusations de néo-colonialisme, de néo-impérialisme, de néo-paternalisme, d’islamophobie, de fascisme, j’en passe et des plus croustillantes. Peut-être. Je ne dis pas que cette solution est parfaite : elle aurait sans doute du mal à être acceptée par les Syriens. Mais je n’en vois aucune autre qui soit morale et viable : toutes me semblent pires.

2 commentaires:

  1. ça date de quand notre dernière intervention qui a bien tourné (pas pour nous, pour les populations locales) ?
    Au nom de tes principes, pourquoi on n'envoie pas l'armée en Arabie Saoudite ? au Qatar ? en Sierra Leone ? au Libéria ? (et j'ai envie de dire : et pourquoi pas dans tous les PVD, ils doivent bien tuer des gens de sang froid pour une opinion mal placée, non ?)
    Les gens ne sont pas opposés à une intervention armée "dans l'absolu", ils sont opposés à celle qu'on leur propose. Où est l'ONU ? Que dit-elle ?

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    1. Je crois que comparer la situation en Arabie Saoudite à celle de la Syrie relève du non-sens. Ce que je reproche à Bachar al-Assad, ce n'est pas d'être à la tête d'un Etat autoritaire, c'est de massacrer son peuple.

      Quant à l'ONU, son fonctionnement actuel la rend absolument inefficace. Ce n'est pas d'elle que viendra une solution, comme ce n'est pas d'elle qu'est venue une solution en Bosnie.

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